Les douleurs induites

DONNADIEU Stéphane Disponible à
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Résumé

Hervé Guibert décrivait ainsi son expérience de la fibroscopie bronchique. Ce témoignage illustre parfaitement la somme des violences infligées aux patients: la douleur présente et massive (alors qu’elle avait été annoncée absente) se superpose aux sentiments d’avoir été trompé, de ne pas avoir été considéré comme un être humain, de demeurer impuissant. De manière quasi expérimentale, on réalise ainsi une spirale infernale où la détresse, la peur renforcent la perception de la douleur. Alors que la même endoscopie pratiquée sous anesthésie générale ou sous sédation profonde accompagnée d’une véritable information aurait donné des résultats opposés. La mise en perspective de ces deux possibilités souligne parfaitement l’injustice fondamentale pour les patients qui bénéficieront ou non de sédation selon l’endroit où sera pratiqué l’acte. Ces insuffisances, ces carences s’expliquent par deux phénomènes interdépendants : un niveau de connaissance très faible lié à des difficultés majeures pour identifier la douleur (que nous infligeons). La douleur induite par les soins a été très peu étudiée; autant la littérature abonde d’articles concernant la douleur postopératoire et la douleur chronique (cancer, lombalgie, douleurs neuropathiques…) autant les articles sur la douleur quotidienne provoquée par les escarres, les pansements, les actes invasifs font singulièrement défaut. Ce manque de connaissances va alimenter les phénomènes de déni qui constituent l’autre obstacle majeur au changement. Reconnaître, admettre la réalité de la douleur reste encore un exercice difficile pour beaucoup d'équipes car cette reconnaissance impliquerait des remises en cause (passées et présentes) incompatibles avec une représentation idéale de soignant « œuvrant inlassablement au soulagement de la souffrance et au combat contre la maladie ». L’absence d’émotions (les défenses) vis-à-vis de la maladie, de la souffrance, a été longtemps cultivée et valorisée, la sensiblerie n’était pas de mise ; la jeune infirmière qui ne supportait pas d’assister impuissante à la souffrance des patients se heurtait aux classiques réponses (« c’est l’infirmière qui a besoin de calmants, faut changer de métier… »). Rappelons que cette non-reconnaissance de la douleur est plus facile chez l’enfant et chez la personne très âgée car leurs moyens d’expression sont limités et leur plainte est beaucoup moins crédible. Les phénomènes de déni sont essentiels à repérer et à analyser car la qualité de la prise en charge en découle directement. Telle équipe satisfaite (malgré la médiocrité de sa prise en charge) et confortée par un déni massif, ne fera aucun effort pour modifier ses pratiques. Telle autre équipe insatisfaite sera au contraire nettement plus motivée pour chercher de nouvelles réponses antalgiques. Face à la détresse d’un patient, plusieurs types d’arguments sont mis en avant pour éviter d’aborder une réflexion sur la douleur et sa prise en charge. Le déni peut être massif, le problème n’existe pas, « Ce n’est pas de la douleur, c’est de la peur, de l’anxiété, de la nervosité, de l’agitation ». Ces qualificatifs sont le plus souvent avancés. De fait, en invoquant uniquement la peur, l’argument est doublement rassurant pour les soignants : ils font l’économie de leur “culpabilité”: le patient est seul responsable de son comportement. 

Thématiques

Médical Nursing Pharmacologie

Mots-clés

douleur, enfant, prévention, soulagement


Détail du document
Éditorial Paris, 2005
ISBN : 9782910844129
Nombre de pages : 179 pages
Langue: Français
Disponibilité en bibliothèque
Type de consultation : Empruntable
Charleroi - 03doule/02/01
Marche-en-Famenne - 06-UPSA-4/02



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