Malgré 25 années de pratique de la médecine générale, la gestion de la douleur reste encore pour moi un défi quotidien de taille. J’ai beau lire et relire les schémas multicolores des voies et des centres de la  douleur, avec leurs différents neurotransmetteurs et récepteurs affublés de lettres grecques (l’alphabet complet n’y suffira bientôt plus), et connaître les multiples molécules disponibles pour la combattre, la perplexité reste souvent présente devant le patient souffrant.

Existe-t-il  un point commun entre la souffrance de ces deux personnes ?

D’une part, cette dame de 45 ans chez qui le moindre contact de mes doigts sur sa peau éveille une douleur, qui reste allongée tout au long de la journée parce que tout effort est pénible, qui a renoncé à son travail, puis petit à petit aux tâches ménagères et aux sorties, qui me supplie sans cesse pour prescrire des antalgiques de plus en plus forts et pour réaliser des examens techniques qui me reviennent désespérément négatifs.

D’autre part, cette autre à peine plus âgée, qui pèse 25 kg, atteinte d’un cancer de la gorge avec une métastase costale de la taille de mon poing. En regard de chaque vertèbre, j’observe une plaie due au frottement de l’os contre le dossier de la chaise. Elle ne se plaint pas, se sent en forme, n’a qu’un souhait : rester autonome et active, se rendre à la Côte dans son appartement avec vue sur la mer. Je lui propose un traitement antalgique, elle refuse, dit qu’elle n’a pas mal, tout au plus quelques douleurs supportables quand elle bouge. Sa sœur, sa maman, l’infirmière et moi-même avons cependant une toute autre perception de la situation.

Clairement, la douleur et la souffrance ne peuvent être réduites à une question d’anatomie, de neurotransmetteurs et de molécules chimiques. Chaque soignant a un rôle spécifique à jouer pour lutter contre elles. Nous donnerons dans ce dossier la parole aux différents professionnels qui interviennent dans les soins palliatifs. Ils aborderont les points qu’ils jugent essentiels pour accompagner  le patient douloureux en fin de vie.

Béatrice Dongenaers, médecin référent dans une équipe de seconde ligne au domicile, met l’accent sur l’évaluation de la douleur par des échelles d’auto ou d’hétéro évaluation validées.  Elle nous encourage à les utiliser.

Alain Arys, médecin coordinateur dans plusieurs MRS, nous décrit sa vision de son rôle de coordination dans la mise en place d’outils pour une meilleure gestion de la douleur au sein des maisons de repos et de soins.

Bernadette Wouters, infirmière et enseignante, nous rappelle que mal prendre en charge la douleur peut avoir des conséquences multiples, elle parle d’effets secondaires de la douleur.

Françoise Rouillon, psychologue dans une équipe mobile de soins palliatifs intra-hospitalière évoque sa place dans la lutte contre la douleur.

Et pour clore, Florence Josse, infirmière de première ligne à domicile nous relate sous forme de témoignage son expérience avec les personnes en fin de vie.

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Par le Dr Pierre Tollet.